Le 11 décembre 2015, à l’âge de 60 ans, Stella Wojas reçoit une douche froide : après 4 jours dans le coma dû à une insuffisance respiratoire, on lui apprend à son réveil qu’elle est atteinte de la sclérose latérale amyotrophique, une maladie dont elle ne guérira jamais. Malgré le sentiment de solitude qui l’habite, elle brise la glace de l’isolement en participant aux groupes de soutien à Ville Lorraine. Aujourd’hui, elle partage son histoire.
QUI SUIS-JE? Je suis Stella Wojas. Je suis une femme aimante, mère, belle-mère, sœur, belle-sœur, tante, confidente et amie. J’ai été une « Superwoman » monoparentale pendant près de 20 ans. Inutile de vous dire que j’ai nagé, pédalé, couru, au sens figuré bien sûr, parce que je n’ai jamais eu la fibre sportive, ni le temps pour m’entraîner à un Ironman! Bref, j’ai jonglé entre les devoirs d’être une bonne mère, mes obligations professionnelles et mon épanouissement personnel. À 47 ans, j’ai enfin rencontré l’âme sœur. J’ai vécu l’Amour avec un grand « A ». Nous avions élaboré de beaux projets de retraite, mais à quelques mois de les réaliser, l’Homme de ma vie est décédé subitement d’un ACV, c’était en février 2014.

Dans l’année qui a suivi son décès, je me sentais lasse et fatiguée. J’ai rencontré mon médecin à plusieurs reprises, j’ai passé plusieurs tests. Il me répétait toujours : « Stella, tu as 60 ans, tu es une de mes rares patientes qui a une santé aussi exceptionnelle et qui ne prend aucune médication. C’est normal que tu te sentes fatiguée, ton conjoint vient de décéder, tu es dépressive, repose-toi. »
Pour me reposer, je me suis reposée! J’ai pris une année sabbatique et j’ai dormi jusqu’à 20 heures sur 24, jusqu’au 11 décembre 2015, date où mes sœurs m’ont amenée d’urgence à l’hôpital. Au réveil de 4 jours dans le coma, j’ai appris que j’étais atteinte de la SLA, une maladie dégénérative, incurable. Wow! Quelle nouvelle! Pourquoi m’avoir réanimée, si c’était pour m’annoncer ça?
Les conséquences de la SLA sur ma condition physique ont fait en sorte que j’ai dû vendre ma maison pour résider dans un endroit plus accessible et plus sécuritaire, parce qu’au-delà des difficultés respiratoires, mes muscles s’affaiblissaient. Seuls les gens de ma génération pourront comprendre, mais mon tronc a aussi peu de tonus que celui de Gumby! J’ai dû me départir de presque tous les biens que j’avais acquis au cours de ma vie et qui étaient le reflet de la personne que j’avais été. Tout cela a été remplacé par un déambulateur, une chaise d’aisance, un fauteuil motorisé, un lit électrique, bref, tout ce qui est nécessaire pour maintenir une certaine qualité de vie à la personne que je suis devenue.

Il y a la Stella d’avant le diagnostic de la SLA, plutôt orgueilleuse, active et « gère-mène » et celle d’après le diagnostic… Celle qui a assimilé seule toutes les conséquences de la maladie, qui a d’abord pleuré, nié, qui était en colère, qui en voulait au monde entier, qui a crié à l’injustice, mais qui a fini par concéder. Celle d’aujourd’hui apprend des leçons d’humilité, se surprend à être plus résiliente et à développer l’autodérision.
Vivre avec la SLA demande un ajustement constant. C’est faire un deuil quotidien de mon indépendance, ma dignité et ma pudeur. Chaque fois que je développe une certaine façon de faire les choses, il y a un autre vilain petit muscle qui refuse de répondre à ma demande. Je dois alors mettre mon orgueil de côté, lâcher-prise et accepter l’aide qui m’est offerte pour effectuer des tâches aussi simples que de me laver, m’habiller, me nourrir, me lever et me coucher.

Je sens continuellement la mort rôder autour de moi. Je vis sur du temps emprunté, avec l’épée de Damoclès au-dessus de la tête, mais la mort ne me fait pas peur. « La plus grande tragédie de la vie n’est pas la mort, mais ce qui meurt en nous pendant que nous vivons. »[1] Cette phrase m’interpelle, car elle reflète exactement l’effet que provoque la SLA sur ma vie.
C’est pourquoi, malgré les frustrations liées à la perte d’autonomie et tout ce qui s’ensuit, j’essaie de voir le bon côté des choses, d’apprécier chaque petit plaisir de la vie comme la gentillesse et le dévouement des gens qui m’entourent, la jouissance du soleil qui me traverse, les frissons provoqués par le vent sur ma peau et je m’émeus facilement par la beauté de la nature qui s’offre à mon regard au gré des jours, de la température et des saisons.
Je salue le courage de tous les gens atteints par cette foutue maladie et plus particulièrement de ceux que je côtoie aux groupes de soutien de la Société de la SLA à Ville Lorraine et sur qui je prends exemple et qui m’inspirent, car la médecine ne peut toujours pas expliquer l’origine de la SLA, ni comment, ni pourquoi elle se développe. Nos discussions brisent non seulement la glace de l’isolement, mais démystifient la SLA, apportent un soutien moral et nous aident à mieux comprendre les réactions de notre entourage qui s’en trouve directement affecté. Au surplus, il n’y a pas de dénominateur commun entre les personnes atteintes, la vitesse de progression ou le chemin qu’emprunte la maladie pour faire ses ravages, ce qui ne facilite pas la tâche des chercheurs. Il n’y a encore aucun traitement, ni aucun espoir de guérison. Dans l’attente d’une solution, on se serre les coudes et on s’entraide.
[1] Norman Cousins
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