L’histoire de Robert Michaud

Je parle à de nombreuses personnes, des célébrités et des gens ordinaires, de ma vie avec la SLA

Je vais commencer par vous décrire qui est Robert Michaud. Je suis père de quatre beaux enfants, Philippe, Marie-Pier, Ann-Liese et Claudine; époux d’une jeune poulette rousse de Saint-Ignace-de-Stanbridge, Pierrette; l’oncle de Jonathan Duhamel (champion mondial de poker 2010 WSOP), et bientôt le grand-papa d’un petit fils (très attendu) en décembre. Je suis fier de ma carrière à IBM, de mon service comme conseiller municipal à Sainte-Sabine, et de mon engagement bénévole dans le hockey mineur et le hockey féminin de la région.

Je suis aussi atteint de la SLA de type bulbaire. J’ai reçu mon diagnostic le 22 septembre l’année passée, le lendemain de mon 53e anniversaire. Après la claque sur la gueule et le coup de poing, j’ai décidé de ne pas rester à rien faire, mais de profiter au maximum du temps qui me reste, en m’impliquant dans les activités de la Société de la SLA, en luttant pour améliorer la vie de ceux qui sont atteints, en réalisant mes rêves avec ma famille et mes proches, et en vivant mes passions, même dans la maladie.

Une de mes passions, c’est le hockey. En fait, j’ai passé les 22 dernières années dans l’organisation du hockey, comme entraîneur, directeur et président du Hockey mineur de Farnham, et président du Tournoi novice atome de Farnham. Puis, je me suis concentré sur le hockey féminin, car deux de mes filles voulaient jouer au hockey. J’ai agi comme entraîneur et directeur du hockey féminin en Estrie, et j’ai pris en charge les premiers championnats provinciaux entièrement féminins. Mes filles jouent encore d’ailleurs, la plus jeune pour les Carabins de l’Université de Montréal.

Depuis bientôt deux ans, j’ai commencé ma deuxième passion, soit la fabrication de stylos en bois. En tant que comptable, j’ai toujours eu un faible pour les beaux stylos et lors d’une visite à la Foire du bois à Saint-Hyacinthe, j’ai vu de très beaux stylos en bois de toutes sortes. En passant devant un certain kiosque, j’ai cru reconnaître l’artisan. J’ai regardé sa carte : Serge Guérin, d’Iberville. Et vlan! C’était mon entraîneur préféré que je n’avais pas revu depuis 33 ans.

On a discuté et j’ai appris qu’il était atteint de quatre cancers, qu’il combattait comme quand il était derrière le banc quand il nous dirigeait. Parti un peu secoué, j’ai contacté son épouse pour savoir si on pouvait lui faire un repas d’équipe. Elle pensait que ça lui ferait plaisir. Alors j’ai retrouvé 17 des 19 joueurs de l’équipe, et ensemble on a fait un repas d’équipe 33 ans plus tard. Serge est décédé depuis ce temps, mais sa passion des stylos en bois vit toujours en moi.

Depuis le jour de mon diagnostic, je suis privilégié. J’ai une baisse notable de la voix, mais je peux encore utiliser mes jambes, mes bras et mes mains. De plus, mon épouse, mes enfants et moi avons décidé de vivre comme si chaque jour était le dernier. On est allé en croisière dans les Caraïbes et ensuite en Alaska. Bien sûr qu’on était moins souvent en costume de bain en Alaska que dans les Caraïbes, mais on s’est baigné quand même dans le spa sur le bateau, avec les montagnes, les glaciers, les paysages incroyables tout alentour. C’était totalement sublime.

Nous avons également vu le Grand Canyon et on a pris un hélicoptère qui nous a amenés au fond du canyon, et un bateau pour voguer sur la rivière Colorado entourée par les murailles du Grand Canyon.

Avec Pierrette et tous mes enfants, je suis allé voir Céline Dion à Las Vegas en avril dernier. Avant le spectacle, on a été reçus par Céline et René, qui sont sensibles à la SLA, car le comptable de M. Angélil, M. Delambre, est aussi décédé de la maladie. J’en ai d’ailleurs profité pour leur remettre mes plumes et stylos de bois : René en ébène et Céline en loupe d’érable à Giguère bleue.

Je parle à de nombreuses personnes, des célébrités et des gens ordinaires, de ma vie avec la SLA, afin de sensibiliser le plus possible le public à cette maladie. J’ai pris la parole lors des événements de la Société de la SLA du Québec, tels que le tournoi de poker Vincent Damphousse et le tournoi de golf. Pourquoi? Quand on sait que le cancer atteint une personne sur trois, comparé à sept personnes sur 100 000 pour la SLA, on peut facilement imaginer où vont les premiers fonds pour la recherche. C’est la raison pour laquelle nous devons travailler plus fort dans les coins, et c’est pourquoi chaque collecte de fonds est importante, si on veut un jour venir à bout de cette terrible maladie.

Les gens merveilleux et dévoués de SLA Québec, qui sont là comme aidants, soutiens aux malades et soutiens à la famille, travaillent fort pour recueillir des fonds pour de l’équipement, des activités et de la recherche, qui est vitale dans le cas de cette maladie. Je fais tout ce que je peux pour appuyer la cause, en participant à fond à des activités de fi nancement, comme « Roulez pour la SLA ». Avec une équipe de neuf personnes, « Les Pédaleux de Bob Michaud », nous avons amassé plus de trois fois l’objectif minimum. On a travaillé très fort, mais c’était super le fun. À notre souper d’équipe en octobre, on regardait même la possibilité d’avoir deux équipes l’an prochain.

Après l’événement Roulez pour la SLA, la directrice générale Claudine Cook m’a demandé:

« Comment tu t’y es pris pour amasser 33 500 $ avec ton équipe de vélo? » Je lui ai répondu en riant que tout est question de repêchage. Je connaissais les joueurs et, comme dirait si bien Michel Bergeron, je leur ai mis des objectifs réalistes, comme finir en avant de toutes les équipes!

J’ai commencé par aller voir tous ceux qui m’ont arraché de l’argent de mon vivant (les banques, les caisses populaires), et je me suis même permis d’aller voir mon entrepreneur en pompes funèbres, en lui disant (avec ma voix de Parrain) : « Tu vas faire de l’argent avec moi, alors ça ne te tenterait pas de contribuer au tour cycliste pour la SLA ? »

Puis j’ai fait appel à tous les donateurs qui me donnaient quand j’étais au Tournoi novice atome de Farnham, où j’ai par ailleurs eu la chance d’accueillir Jacques Demers, Dany Dubé, Guy Lafl eur et Réjean Houle, à titre de président d’honneur du Tournoi.

Et maintenant, je vise trois autres buts. J’aimerais passer plus d’entrevues afin de sensibiliser plus de gens à la SLA. J’essaie d’avoir une entente avec Apple pour fournir aux patients de la SLA des bons rabais sur des iPad dotés du logiciel de synthèse de la parole Speak It!, qui nous permet de communiquer plus facilement, et de semblables commandites avec d’autres entreprises. Et j’ai beaucoup de stylos à faire avant Noël!

Comme j’ai dit à mes amis, cette maladie ne sait pas à qui elle s’est attaquée. Je vais lui donner du fil à retordre. À nous deux, SLA!

Robert Michaud (décédé le 19 février 2013 à l’age de 55 ans)

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